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)î( UN CHANT ECARLATE )î(
30 juin 2021

DP-4

4

DEUXIEME PARTIE

4

L’aéroport de Dakar-Yoff frémissait de l’émotion des départs et des arrivées.

Les démêles des voyageurs avec les services d’enregistrement des bagages et le contrôle douanier, les discussions avec les porteurs s’ajoutaient à l’ambiance de foire.

L’atterrissage de l’avion de Paris, annoncé par une hôtesse, se fit à l’ heure prévue , à la grande surprise de Djibril Guéye , qui jugeant bien fantaisistes les horaires des avions , avait fait provision de patience.

Les premiers voyageurs ! Les premières étreintes !

Djibril aperçut son fils. Le mariage et le repos lui avaient réussi. Son teint était devenu plus « chocolaté» et il avait grossi. Ils se firent des signaux. Djibril reconnut Mireille. Elle était semblable à ses photographies. Ses formes étaient moulées par un jean blanc.

Mireille reconnut en l’homme à la canne Djibril Guéye. Ousmane lui ressemblait : mêmes traits, même large carrure. Djibril Guéye arborait, en l’honneur de l’étrangère son boubou blanc brodé. Yaye Khady avait ressorti, pour éblouir Mireille, toutes les décorations.

Mireille étreignit chaleureusement son beau-père qu’elle appréciait bien, à cause des logs paragraphes que lui avait consacrés Ousmane dans leur correspondance.

Djibril répondit affectueusement à cet élan de tendresse. Mireille se sentait acceptée. Ils se dirigèrent vers la sortie. In porteur avait rassemblé les bagages qu’on dirigea vers une camionnette. Ils louèrent un taxi et le convoi s’ébranla vers Gibraltar.

Mireille retrouva l’autoroute qu’elle empruntait autrefois avec ses parents, pour aller vers la Petite Cote. Elle déroulait indifférente, ses deux rubans bien étroits. De part et d’autre, les mêmes terrains nus bordés çà et là de haies rabougries. Quelques villages banlieusards. Le taxi bondissait sur la chaussée inégale. A la gare routière de Colobane, il s’énerva pour se frayer un passage dans la foule dense puis il bifurqua.

Ousmane rappelait :

-       L’immeuble des Prestations familiales

Un peu plus loin :

-       Le lycée des jeunes filles où tu enseigneras peut-être.

A quelques mètres du lycée :

-       Le monument de l’Indépendance ! Tu te souviens ?

Un arrêt, ordonné d’un geste par un agent de police, permit à la camionnette aux bagages de rattraper le taxi.

En peinant sur la rue sablonneuse qui borde la gendarmerie, le convoi arriva à Gibraltar. Ousmane présenta son quartier :

-       Gibraltar , construit par l’ OHLM , a hérité de l’ emplacement et du nom d’ un quartier précédent , où régnait , dit-on , dans le désordre des baraques et des débits de vin de palme, dans les bagarres des prostituées et les  flammes d’ incendies fréquents , un climat d’ insécurité !

Mireille descendit et machinalement s’accrocha au bras de son mari. Personne n’avait prononcé le nom de Yaye Khady. Mais elle planait sur le groupe, ombre inquiétante.

*

* *

Yaye Khady vit pour l première fois Mireille, « en chair et en os», au bras de son fils. Jusqu’ à la dernière seconde, elle avait eu l’espoir de voir approcher une femme banale, que l’art photographique avait embellie outre mesure. Elle reçut, médusée, le choc de la beauté de Mireille. « Une djinn échappée de son monde !» lui revenait à l’esprit. Il émanait des yeux pers un pouvoir de séduction ensorceleur.

Mireille lâcha le bras de son mari, avança souriante, vers sa belle-mère. Elle l’embrassa et mit dans son mouvement toute la tendresse qui l’habitait. Autant l’affection émanait d’elle, autant la raideur de Yaye Khady surprenait. Néanmoins, elles se serrèrent et échangèrent en français ou en wolof les mots de circonstance.

Mireille s’inquiétait :

-       Et Babacar ? Et Soukeyna ? Et Safiétou ?

Ousmane traduisit la réponse de Yaye Khady :

-       Invités chez Tante Coumba

Yaye Khady ajouta, non sans perfidie :

-       Est-ce que ta femme connait aussi tante Coumba ?

C’était une façon de rappeler à son fils Mariéme … Une façon de la rappeler entre Ousmane et la « diablesse ».

Ousmane, sentant l’animosité de Yaye Khady, voulut détendre l’atmosphère :

-       Bien sur que ma femme connait de nom tante Coumba et Mariéme.

Il ajouta avec un sourire malicieux :

-       Ouleymatou aussi et bien d’autres … mais c’est que j’aime, que j’ai choisi d’épouser.

-       Yaye Khady se tut. Dés cet instant, elle ne comptait plus que sur elle-même pour chasser l’usurpatrice.

Le problème de langage n’arrangeait pas les rapports des deux femmes d’Ousmane.

Ousmane Guéye insistait :

-       Apprends vite le wolof pour t’en sortir, Mireille.

Mais le wolof n’était pas facile, et malgré les heures studieuses passées en compagnie du dictionnaire français –wolof offert par son mari, pour son apprentissage, Mireille ne le maitrisait pas.

Elle se fit violence pour adopter provisoirement un mode de vie communautaire qui l’irritait. Les repas étaient toujours servis dans un grand plat en aluminium à usage commun, posé au milieu d’une natte qui, repliée, regagnait un coin à la propreté douteuse. L’eau qui servait à se laver les mains noircissait après le premier usage. Cela n’empêchait pas d’autres plongeons de mains et Mireille n’osait pas faire exception.

Yaye Khady, perfidie ou habitude ? Préparait des mets épicés qui suppliciaient Mireille. L’écoulement de ses narines l’empêchait d’avaler et voici plusieurs jours que sa gourmandise ne se satisfait que de fruits.

Et Yaye Khady profitait des plus futiles motifs pour s’introduire dans la chambre de la jeune femme, dérangeant son intimité réduite à cette seule pièce.

-       Djibril Guéye est plus humain, constatait Mireille.

Ousmane défendait sa mère :

-       Elle se sent frustrée. Tu dois lui pardonner. Elle me perd. Toi, tu m’as.

Mireille en dehors de l’hostilité distillée sournoisement par sa belle-mère, Mireille était fêtée. Les droits sacrés de l’hospitalité étaient respectés en apparence. Soukeyna, la plus grande des sœurs de son mari, lui lavait son linge, l’aidait à communiquer.

Lorsque son recrutement par le ministère de l’Education nationale lui permit d’obtenir un logement administratif, elle s’empressa de dégager son ménage de la tutelle désagréable de Yaye Khady Diop.

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  • Ce roman retrace une grande histoire d' amour entre un jeune sénégalais et une jeune française . Confrontée aux difficultés ,saura-t-elle résister aux nombreuses pressions de la société sénégalaise?
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