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)î( UN CHANT ECARLATE )î(
16 juin 2021

PP-11

11

PREMIERE PARTIE

11

Ousmane s’installa à sa table de travail. La photographie de l’ « actrice», après s’être dédoublée d’ abord sur la table, avait proliféré pour couvrir les pages d’un album entier. Les photographies en couleur ressemblaient à des cartes postales.

-       Mais où prends-tu toutes ces poses de l’actrice ? interrogeait la curieuse Yaye Khady.

-       Je les achète, mentait Ousmane.

Dés lors, Yaye Khady put admettre une manie de collectionneur. Ni Djibril Guéye ni elle n’eurent aucune arrière- pensée, même quand Ousmane leur remit des cadeaux, « de la part d’une ancienne camarade blanche de la faculté, rentrée en France ».

Djibril avait remarqué :

-       Celle qui écrit tout le temps ? Les tubaab aiment écrire.

-       Il avait eu une belle monte de poche qui le dirigeait à temps vers la mosquée. Le collier de Yaye Khady était un bijou qu’admiraient ses voisines, en lui demandant sa provenance.

-       Un cadeau ! lançait-elle avec une voix sèche, évasive.

Rien n’arrête la coquetterie féminine, elle le savait, dans la recherche de l’originalité et elle ne souhaitait pas voir à un baptême toutes les poitrines ornées du même collier.

Il ne venait pas aux parents d’Ousmane l’idée que cette amie lointaine et généreuse pouvait être la même personne présente sous leur toit par ses photographies.

La stratégie défensive d’Ousmane avait résisté au temps et à la curiosité. Mireille en France, personne ne soupçonnait son secret. Il ne se refusait pas les plaisirs sans conséquence de son âge et yaye Khady ne faisait rien pour le pousser au mariage, acceptant les flirts éphémères, dans le quartier, où il était réputé « inconstant».

Il se mit à corriger les copies de ses lycéens avec application. La proposition de tante Coumba ne le troublait pas. Il eut un sourire amusé au souvenir du portrait de Mariéme campé par sa mère.

Il admit :

-       Affreuse, cette Mariéme ! comme une hyène !

Le désaccord de ses parents au sujet de cette enfant serait son meilleur argument, si jamais Djibril Guéye exigeait son avis.

Son père eut la délicatesse de deviner son refus.

La disparition boudeuse de Coumba, l’absence de Mariéme les dimanches suivants prouvèrent à Ousmane l’intervention de Djibril. Sa reconnaissance se concrétisa par une canne neuve.

*

* *

L’heure du diner ! La famille Guéye était réunie au rez-de-chaussée de la nouvelle demeure. Yaye Khady présenta du mbuum-Sauce à base de feuilles de choux ou de moringa et d’arachides crues qui accompagne le couscous -, le mets favori de son mari.

Les mains puisaient dans le plat commun. Yaye Khady arrosait le couscous de temps en temps avec une louche remplie de sauce.

La saveur du mbuum, réussi à merveille par Yaye Khady, déliait les langues. Ousmane profita de cette gaieté générale pour annoncer son désir de voyager.

-       Je veux connaitre Paris. J’ai déposé ce matin une demande d’autorisation de sortie. Je ferai établir un passeport.

-       Djibril Guéye saisit cette nouvelle occasion pour évoquer le pays de « sa» guerre, ce qu’il en connaissait avant sa chute d’une jeep qui l’avait trainé en cassant sa jambe.

Yaye Khady malicieusement conseilla à son fils :

-       Fais tout pour voir ton actrice en chair et en os. On dit que les actrices sont mal élevées. Mireille (Ousmane lui avait dit le nom) est  belle, très belle. Elle doit être plus insolente que les autres. Quand la beauté est source de revenus, elle entraine la dureté du cœur.

Babacar priait avec insistance :

-       Dis, tu m’emmènes, frère ? Si je réussis mon BEPC, m’emmèneras-tu en vacances avec toi ?

Ousmane écoutait plutôt Djibril Guéye qui fournissait des détails importants :

-       Ce sera l’été ; néanmoins il ya souvent des pluies traitresses, et un froid mordant. Méfie-toi des changements du temps. Ton voyage peut être instructif si tu sais regarder. Tu observeras, vérifieras. Tu te feras une opinion en comparant avec le contenu de tes livres.

Yaye Khady prévint :

-       Il parait que les femmes blanches s’attachent facilement aux Noirs. Méfie-toi. Ne nous ramène pas l’une d’elles.

Ousmane se leva gêné et, pour s’isoler, prétexta la préparation de ses cours.

Il n’eut aucun remords à dissimuler aux siens le motif de son voyage. Ses parents eux-mêmes avaient convenu : « Le bouc choisit sa femelle.»Yaye Khady avait ajouté que «  Le choix de sa femme lui incombait».

En cachant le véritable but de son voyage, il reculait le moment des heurts.

« A quoi bon déchainer précocement les hostilités.

« On verra …»

Les vacances s’annonçaient. Les examens et les concours s’oubliaient dans l’apaisement des nerfs.

Ousmane se surprenait à chantonner pour lui-même : « Je vais me marier ! Je vais me marier !»

Il allait se marier en effet et cette perspective l’imprégnait d’une délicieuse sensation d’allégresse, manifestée par une débauche inhabituelle de gestes et de propos. Il allait se marier, vivre le rêve tant de fois caressé ! Ousmane avait envoyé depuis plusieurs mois, à un vague cousin, Lamine qui résidait en France, ses pièces d’état civil pour les formalités préparatoires.

Et  Yaye Khady le trouvait transfiguré :

-       Encore un qui va nous remplir les oreilles de Paris à son retour ! Si Ousmane a déjà cet air heureux avant son voyage, je me demande dans quel état il reviendra, quand il aura « vu» !

-       Et Yaye Khady éprouva une certaine fierté. Fiévreusement, Ousmane prépara son voyage.

-       Il fit des emplettes. Des objets de l’artisanat sénégalais emplirent sa valise.

-       Comme cadeau de noces, quel objet offrir à sa fiancée pour concrétiser son amour ? Il fixa son choix sur un bracelet aux dessins faits de minces fils d’or, travail de filigrane ou les bijoutiers sénégalais excellent. Il emporta aussi, en se faisant violence- Mireille le lui avait suggéré-, deux alliances, symbole de l’état nouveau qui allait être sien.

Un Boeing, en retard de trois heures sur l’horaire de décollage prévu, emporta vers Mireille.

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  • Ce roman retrace une grande histoire d' amour entre un jeune sénégalais et une jeune française . Confrontée aux difficultés ,saura-t-elle résister aux nombreuses pressions de la société sénégalaise?
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